Nintendo a encore une fois surpris son monde en annonçant jeudi dernier le lancement d’une application de streaming musical sobrement appelée Nintendo Music. Exclusivement dédiée aux bandes-son de ses jeux, Nintendo Music est d’ores et déjà disponible sur iOS et Android. Ce service est réservé aux abonnés Nintendo Switch Online, renforçant ainsi l’écosystème propriétaire de la marque japonaise.
Découvrez Nintendo Music ! 🎶 (Nintendo Switch Online)
Une offre alléchante, mais est-elle nécessaire ?
L’application promet un vaste catalogue musical, allant des classiques de Mario et Zelda aux thèmes plus récents d’Animal Crossing et Pokémon. Nintendo va jusqu’à inclure des pistes moins évidentes comme les thèmes des menus Wii, témoignant d’une volonté de satisfaire même les fans les plus pointus.
Cependant, on peut légitimement se demander si cette application répond à un réel besoin. Les bandes-son de jeux vidéo sont déjà largement disponibles sur les plateformes de streaming traditionnelles, souvent de manière officielle. En créant son propre service, Nintendo ne fait-il pas que fragmenter davantage un marché déjà saturé ?
Une stratégie d’isolement discutable
Cette initiative s’inscrit dans la tendance de Nintendo à vouloir tout contrôler, de la production à la distribution de ses contenus. Si cette approche a souvent été payante pour l’entreprise, elle risque ici de limiter l’accès à ces musiques emblématiques pour le grand public.
De plus, en réservant l’accès aux seuls abonnés Nintendo Switch Online, la firme de Kyoto restreint encore davantage son audience potentielle. Cette décision pourrait être perçue comme une tentative de monétiser à outrance sa propriété intellectuelle, au détriment de l’accessibilité.
Une omission majeure : les droits d’auteur
Malgré ses fonctionnalités innovantes, Nintendo Music présente une lacune importante : l’absence totale de crédits pour les compositeurs. Cette omission est particulièrement surprenante venant d’une entreprise connue pour sa défense rigoureuse des droits d’auteur.
Des artistes de renom comme Koji Kondo, créateur des thèmes emblématiques de Mario et Zelda, ou David Wise, compositeur des Donkey Kong Country, ne sont pas mentionnés dans l’application. Cette absence de reconnaissance soulève des questions éthiques sur la valorisation du travail artistique dans l’industrie du jeu vidéo.
Ce manque de transparence pourrait également avoir des implications juridiques, notamment en ce qui concerne la rémunération des compositeurs pour la diffusion de leurs œuvres sur cette nouvelle plateforme.
Des fonctionnalités intéressantes, mais suffisantes ?
Nintendo Music n’est pas dénuée d’atouts. La fonction anti-spoiler, permettant de limiter l’accès à certaines musiques pour éviter de gâcher des surprises de jeu, est une idée intéressante. De même, le système de recommandations pourrait aider les utilisateurs à découvrir des pépites méconnues du catalogue Nintendo.
Néanmoins, ces fonctionnalités suffisent-elles à justifier l’existence d’une application dédiée ? N’auraient-elles pas pu être intégrées à l’application Nintendo Switch Online existante, par exemple ?
Un pas de trop vers l’isolement numérique ?
Avec Nintendo Music, l’entreprise japonaise démontre une fois de plus sa volonté de maîtriser l’intégralité de son écosystème. Si cette stratégie a souvent été couronnée de succès par le passé, elle soulève ici des questions sur la pertinence d’une telle fragmentation des contenus.